Une âme nomade

Publié le 12 Septembre 2005

Mauricette Pons, 70 ans, marche depuis toujours. Elle raconte sa dernière randonnée en solitaire sur la Méridienne Verte dans un ouvrage paru chez l’éditeur pyrénéen Monhélios.

QUAND AVEZ VOUS COMMENCÉ À MARCHER?
J’ai marché depuis l’exode. J’ai appris la boussole avec mon grand-père officier. Mon père est mort à la guerre après avoir été prisonnier. Je suis Sagittaire, et comme les chevaux, pour moi l’herbe d’à côté est toujours plus verte. J’aime marcher… mais pas revenir. Je pense que ma grand-mère a dû fauter avec un gitan, car j’ai l’âme nomade. J’ai déjà traversé les Pyrénées en solitaire, parcouru le chemin de Saint-Jacques, fait le tour de Bourgogne, du Morvan et de Puisaye entre autres. Lorsque j’ai commencé à traverser la France sur le trajet de la Méridienne, je n’en étais pas à mon premier grand raid !

QU'EST CE QUI A MOTIVÉ VOTRE PÉRIPLE?
Lors de deux voyages dans le Nord à sept ans d’intervalle, j’ai découvert successivement deux emplacements pour les balises de la méridienne d’Arago, dont j’ai alors appris l’existence. Cela m’a permis de connaître le projet de Méridienne Verte de l’an 2000 lancé par Paul Chemetov. Elle a été matérialisée par la plantation de jeunes arbres et par 135 médaillons placés du nord au sud. Ils m’ont servi de balise tout au long de mon périple. J’ai parcouru 1651 km, en 80 étapes et sur deux années. Je ne revendique pas d’avoir fait un exploit. Ma seule fierté est d’avoir été la première à suivre la méridienne verte en solitaire.

QUELS SOUVENIRS GARDEZ VOUS?
J’ai souvent reçu un excellent accueil. Une personne seule fait moins peur que plusieurs, qui forment tout de suite un groupe et deviennent « les étrangers ». A Viarmes, dans le Val d’Oise, le gîte d’étape était totalement occupé par un groupe. Les responsables m’ont accueillie quand même, fait manger à leur table et logée à l’infirmerie! Autre souvenir, à Lussat, en Auvergne, j’ai longuement conversé avec une vieille femme. Elle avait besoin de parler, moi de me rassurer. A mon retour, j’ai reçu une écharpe qu’elle m’avait tricotée et qui soulage depuis mes rhumatismes.

AVEZ VOUS AIMÉ ÉCRIRE VOTRE HISTOIRE?
C’est la première et la dernière fois que j’écris un livre. Je l’ai rédigé à la demande de l’éditrice, uniquement parce que les droits étaient reversés à la recherche contre la sclérose en plaques. L’accouchement d’un tel ouvrage ne s’est pas passé sans douleur. Avec mon seul certificat d’études en poche, j’ai le bac moins sept ! J’ai pris des notes durant mon voyage que j’ai réécrites à mon retour pour en faire des phrases. Traduire en mots ce que j’ai ressenti a été le plus difficile. Avec les photos, c’est différent, les émotions remontent facilement à la surface. Et pourtant je n’ai pas voulu qu’on reprenne mon texte. Mes mots ne sont pas des lentilles, je refuse qu’on les trie.

ÊTES VOUS PYRÉNÉENNE DEPUIS TOUJOURS?
Je le suis devenue car je suis née au hasard d’une garnison de mon père en Franche Comté, puis j’ai très longtemps habité en Bourgogne, une terre très accueillante, où j’ai vécu mes plus belles années. Mes grands parents sont pyrénéens, mais moi je ne me sens ni d’ici, ni d’ailleurs. Mourenx est un pays vert, entouré de coteaux. J’aime les collines, pas la haute montagne. J’aime les prés, pas les cailloux. Pour moi, il faut que l’œil court toujours. Question de vie.
 

Rédigé par Marie Remande

Publié dans #portrait

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A
Coucou... merci pour cette gentille visite sur mon blog, ça m'a fait très plaisir. Je t'envoie demain, par mail les indications pour placer tes photos. Gros bisou de Montréal
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